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Développement durable: Projet du Conseil fédéral sans ambition ni objectifs concrets
19.02.2021 – Non contraignante, vague, peu ambitieuse: la stratégie du Conseil fédéral pour mettre en œuvre l'Agenda 2030 de l'ONU sur le développement durable, en consultation jusqu'à jeudi, a suscité une pluie de critiques.
Le réseau "Sustainable Development Solutions Switzerland" (SDSN) le résume sans ambages: ce projet du gouvernement ne permettra pas à la Suisse d'atteindre les 17 objectifs fixés par l'Agenda 2030. Pour les 60 organisations membres de ce réseau, il lui manque des solutions concrètes pour éviter la crise écologique et sociale qui s'annonce.
Des objectifs plus ambitieux, un plan financier et l'implication d'acteurs clés de la science, de l’économie et de la société civile sont notamment indispensables, ainsi qu'un système de contrôle. Des exigences reprises par l'ensemble des ONG qui se sont exprimées et plusieurs partis, dont le PS et les Verts.
"Evaluation sérieuse impossible"
"Ni la mise en œuvre des objectifs ni leur vérifiabilité ni le volet financement ne sont définis" dans ce plan, "ce qui rend impossible une évaluation sérieuse", constate le PLR, à l'instar de l'Union suisse des arts et métiers (USAM).
Cette dernière rejette malgré tout la stratégie présentée, qui discrimine selon elle "ouvertement divers secteurs de l'économie, tels que la mobilité ou certains services".
L'UDC la refuse également. Motif : certaines exigences font actuellement l'objet d'une consultation en Suisse. Le gouvernement ne peut pas intervenir dans ce processus démocratique par le biais d'une "campagne contrôlée de manière centralisée, sous le couvert de la durabilité, avec toutes sortes de demandes politiques très controversées".
Seul parti à soutenir le plan du Conseil fédéral, même si ce dernier "n'a pas un niveau d'ambition assez élevé pour atteindre les objectifs", le Centre "suppose que des instruments concrets seront proposés en temps utile pour mettre en ½uvre les lignes directrices" exposées. Pour les Vert'libéraux, il manque fondamentalement à cette stratégie "une vision claire et l'intention de mettre en route une transformation".
La Suisse, mauvaise élève
Or, la Suisse doit avoir un rôle de meneur dans la mise en œuvre de l'Agenda 2030, estiment notamment le SDSN, les Verts et l'Entraide Protestante Suisse (EPER).
Elle a en effet un fort impact négatif sur la mise en œuvre des objectifs mondiaux de développement durable. Cela en raison "de son implication dans des flux financiers globaux préjudiciables", et à travers l’importation de biens, en provoquant de la pollution et de la perte de biodiversité dans les pays d’origine de ces produits.
Pour les Verts et le PS, l'objectif d'un développement durable ne pourra pas être atteint tant que le credo de la croissance perpétuelle, en contradiction avec la réalité d'une planète finie, ne sera pas remis en question.
Objectifs contradictoires
Les priorités fixées par le Conseil fédéral - biodiversité, climat et modes de consommation - sont certes les bonnes, admet Pro Natura. Mais le projet ne dit par exemple pas comment concilier des objectifs potentiellement contradictoires, comme garantir suffisamment d'espace pour la biodiversité en Suisse tout en couvrant les besoins en logements.
Fondamentalement, ce plan ne contribue pas à réduire l'empreinte écologique de la Suisse, toujours trois fois trop élevée. Il y manque notamment la mise en place d'un cadre législatif qui favorise des comportements plus durables.
Emissions de la place financière
Une lacune aussi pointée par le PS, les Verts et Alliance Sud. Celle-ci réclame "un mélange subtil d'incitations et de réglementations contraignantes, en particulier pour réduire les émissions de CO2 de la place financière et promouvoir des entreprises responsables."
Pour le PS, la définition du "financement durable" devrait aussi inclure l'orientation du budget fédéral, la réduction des subventions et impôts non durables, le domaine des marchés publics et la coopération internationale.
"Pauvreté trop peu réduite, perte des sols jusqu’à mi-siècle, investissements poursuivis dans les énergies fossiles : ce n’est pas une vraie stratégie de développement durable qui est en consultation", fustige pour sa part la Plateforme Agenda 2030.
Le projet du Conseil fédéral expose le plus souvent des décisions déjà prises, relève aussi ce Réseau suisse de plus de 50 fédérations et organisations de la société civile, à l'instar du PS, des Verts, des Vert'libéraux, de l'EPER, mais aussi de l'UDC.
La durabilité doit être partout
Au niveau national, la plateforme estime indispensable une stratégie de durabilité qui implique tous les départements et offices fédéraux. Les Vert'libéraux y ajoutent les cantons et les communes, et considèrent essentiel d'intégrer systématiquement le développement durable dans toutes les politiques sectorielles de la Confédération.
Pour rompre avec une planification cloisonnée, qui inquiète aussi le PLR, le PDC et le PS, les Verts proposent de former un comité pour le développement durable.
Adopté en 2015, l'Agenda 2030 de l'ONU n’est pas contraignant juridiquement, mais pose un cadre de référence. La stratégie du Conseil fédéral, conçue pour dix ans, définit des priorités dans les secteurs où il juge nécessaire d'agir. Trois thèmes prioritaires ont été retenus : consommation et production durables, climat, énergie, biodiversité et égalité des chances.
Routesuisse regrette toutefois un important déséquilibre entre la prise en compte des intérêts environnementaux d'une part et les intérêts sociaux et économiques d'autre part. La croissance démographique et l'augmentation de la demande en énergie et en infrastructures de toutes sortes qui l'accompagnent ne semblent pas être prises en compte, déplore l'organisation.
Auteur : Agence Télégraphique Suisse (ATS)