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Le monde paysan affecté indirectement par les sanctions en Russie
07.03.2022 – Le monde paysan doit composer depuis plusieurs mois avec une hausse des prix des engrais azotés, une inflation rendue galopante par l'éclatement de la guerre en Ukraine. Les sanctions contre la Russie ont fait bondir le cours du gaz naturel, utilisé comme matière première pour ces fertilisants.
"Après la flambée en 2021, les prix des engrais sur le marché mondial s'étaient quelque peu stabilisés ces dernières semaines. Avec le début de la guerre, ils sont à nouveau partis à la hausse", a indiqué à AWP l'incontournable coopérative agricole Fenaco, qui détient Landor, géant de l'importation d'engrais en Suisse.
Le constat est identique chez Ameropa, qui pointe du doigt le cours du gaz naturel. La pénurie de cette matière première et la multiplication par cinq de son prix sont à l'origine d'une situation "particulièrement grave", selon le groupe bâlois, l'un des principaux fabricants d'engrais azotés basés sur territoire helvétique.
Fenaco rappelle que jusqu'à 80% des coûts de production des engrais azotés sont influencés par les prix de l'énergie, notamment ceux du gaz. Depuis le début de l'année le cours de cet hydrocarbure a plus que décuplé. Les sanctions économiques infligées à la Russie après l'invasion de l'Ukraine suscitent des craintes concernant l'approvisionnement en gaz naturel, bien qu'épargné par les mesures des pays occidentaux et de leurs alliés.
Les agriculteurs ne devraient pas ressentir l'impact immédiatement. "Jusqu'à présent, nous avons réussi à atténuer sensiblement les hausses de prix" pour les clients, note Fenaco, qui déplore néanmoins une pression accrue sur les coûts de production des familles paysannes. Le conflit en Ukraine ne fait que renforcer ce phénomène, souligne la coopérative, qui ne s'attend pas à une détente rapide de la situation.
Contactée, l'Union suisse des paysans n'a pas souhaité s'exprimer sur le sujet.
Réserves stratégiques
L'année dernière, la Suisse a importé un volume de 210'000 tonnes d'engrais (azote, phosphore et potassium), selon les chiffres transmis par Fenaco. Le géant bernois se fournit principalement en Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas et en Norvège.
Au bout de la chaîne, le consommateur ne devrait pas voir son pouvoir d'achat s'éroder trop fortement, à en croire la coopérative agricole. "Le coût de la farine, par exemple, ne représente qu'un peu plus de 10% du prix du pain au total." Les charges de personnel, les loyers et d'autres éléments pèsent davantage sur le prix des denrées alimentaires.
Reste que les fertilisants ne sont pas un produit comme un autre. La Confédération impose la constitution de réserves obligatoires visant à garantir - in fine - l'approvisionnement en denrées alimentaires du pays. Concernant l'azote, ces stocks s'élèvent à 17'000 tonnes, a précise la coopérative Agricura, qui regroupe les sociétés accumulant ces réserves.
L'Office fédéral pour l'approvisionnement économique du pays (Ofae) a autorisé les propriétaires de stocks obligatoires à mettre sur le marché dès mi-janvier jusqu'à 20% du volume total des engrais issus des réserves. Les difficultés de navigation sur le Rhin, causées par la sécheresse, ont aggravé la pénurie ayant pour origine la hausse du cours du gaz naturel et des restrictions à l'exportation de certains pays.
Pour l'Ofae, il est difficile d'estimer comment la situation va désormais évoluer, car celle-ci dépend de "nombreux facteurs volatils". L'évolution du secteur du gaz en fait partie, selon cet office.
La Suisse ne possède pas de stocks obligatoires de gaz naturel, cet hydrocarbure étant remplacé en cas de pénurie - pour le chauffage uniquement - par du mazout extra-léger.
Auteur : Agence Télégraphique Suisse (ATS)