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Les consommateurs seront informés sur l'origine du bois
03.01.2022 – A l'achat d'un bloc-notes, à la pose d'un parquet ou lors de l'installation d'un chauffage à pellets, le consommateur devra être informé sur le type et l'origine du bois utilisé. A partir du 1er janvier, la traçabilité du bois devra être documentée. Le bois issu d'une récolte illégale ainsi que les produits fabriqués avec ce matériau seront interdits sur le marché suisse.
Certains consommateurs renoncent déjà actuellement à des produits en bois dont l'origine est déclarée, explique Laurianne Altwegg, responsable environnement, agriculture et énergie à la Fédération romande des consommateurs, à Keystone-ATS. S'il "provient du Brésil par exemple, cela peut mettre la puce à l'oreille de certains quant à une éventuelle participation à la déforestation".
Au vu du nombre important de produits concernés et de l'absence d'informations sur beaucoup d'entre eux, il est toutefois actuellement difficile pour les consommateurs de faire un choix éclairé, poursuit Mme Altwegg. "Comme la déclaration obligatoire de l'origine du bois ne concerne que peu de produits, la plupart des consommateurs ne peuvent pas connaître celle des nombreux produits dérivés et savoir si le bois est illégal."
La responsabilité revient donc aux commerçants, selon elle. C'est pourquoi elle salue les nouvelles normes légales. "Il est nécessaire d'améliorer l'offre sur le marché suisse."
Devoir de diligence
Conformément à la loi révisée sur la protection de l'environnement, adoptée par le Parlement en 2019, et l'ordonnance sur le commerce du bois, les commerçants en bois devront respecter un devoir de diligence lorsqu'ils en importent pour la première fois en Suisse. Cette obligation ne s'appliquera pas au bois et aux produits dérivés déjà mis sur le marché helvétique.
Ils devront se renseigner sur le type de bois, le pays voire la région d'origine ou encore les données relatives à la récolte. Un système devra leur permettre de prouver qu'ils ont effectué la démarche.
Une analyse de risque sera aussi exigée. En cas de risque élevé, les commerçants seront tenus de le réduire à un "niveau négligeable", en demandant des documents supplémentaires au fournisseur par exemple. Il y a "risque élevé" notamment si l'indice de perception de la corruption du pays d'origine est inférieur à 50 - cette échelle va de 0 à 100, de "fortement corrompu" à "très peu corrompu".
La modification de loi s'appliquera aussi au bois récolté en Suisse, lorsqu'il est mis sur le marché pour la première fois. Le bois helvétique sera considéré légal si la législation a été respectée lors de la récolte. Le contrôle des propriétaires forestiers revient déjà aux cantons.
L'Office fédéral de l'environnement (OFEV) surveillera les importations. Il procédera en fonction du risque : les contrôles viseront avant tout les grandes quantités de bois et les importations depuis des pays à risque. Si une entreprise ne respecte pas son devoir de diligence, son responsable encourra une peine de prison allant jusqu'à trois ans ou une peine pécuniaire.
Vaste palette de produits
Si la modification ne change rien pour les exportateurs helvétiques, elle demande plus de bureaucratie aux importateurs, indique à Keystone-ATS Daniel Ingold, directeur du Cedotec, l'Office romand de Lignum, la faîtière de l'économie suisse de la forêt et du bois.
Des discussions sont en cours entre l'OFEV et les branches pour trouver "le chemin qui permettra de ne pas avoir trop d'entraves administratives", explique-t-il. Et d'évoquer des solutions de branches pour fournir des outils aux membres.
Les revendeurs et les détaillants seront aussi concernés par la modification de loi. Ils devront pouvoir prouver d'où vient le bois qu'ils achètent et à qui ils le revendent.
La traçabilité du bois devra être connue pour une vaste palette de produits. Outre les blocs-notes, le parquet et les pellets, les matériaux pour la construction, les meubles de cuisine, les cadres photos ou encore les tonneaux pour le vin seront concernés.
En revanche, les meubles en bois usagé ou recyclé ne le seront pas. De même que les emballages dont le but est uniquement de protéger le contenu, comme les sacs en papier, ainsi que les produits en bambou.
Pas que le bois illégal
Les nouvelles dispositions légales doivent permettre de lutter contre les changements climatiques en ralentissant la déforestation et la perte de biodiversité. C'est un premier pas mais la mesure ne suffit pas, commente Johanna Michel, directrice adjointe du Fonds Bruno Manser, contactée par Keystone-ATS.
La lutte contre la déforestation et la durabilité ne sont pas garanties en ne se concentrant que sur le bois illégal. "Ce n’est pas parce que du bois a été récolté légalement qu’il l’a été de manière durable", précise-t-elle. Et de demander que la Suisse interdise l'importation de tous les produits ayant un lien direct avec la déforestation, comme l'a proposé l'Union européenne (UE) en novembre.
La loi révisée doit justement aussi permettre de supprimer les entraves au commerce entre la Suisse et l’UE, qui a déjà interdit la mise sur le marché de bois illégal. Près de 95% du bois suisse est exporté vers l'UE, ce qui représente 1,5 milliard de francs par an.
Dans l'autre sens aussi, la majeure partie du bois importé en Suisse provient de l'UE, ce qui permet déjà un filtrage, indique M. Ingold. La loi révisée est une première étape vers la reconnaissance bilatérale entre la Suisse et l'UE, selon lui.
Auteur : Agence Télégraphique Suisse (ATS)