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Un programme de gestion des troupeaux mené dans le Jura
Les explications de Luc Gerber, vétérinaire à Delémont.
Vous êtes vétérinaire à Delémont, où vous menez depuis plusieurs années un programme de gestion des troupeaux: de quoi s’agit-il ?
Avec plusieurs collègues du Jura et du Jura bernois, Bâle et Soleure, nous faisons de la médecine vétérinaire préventive en intervenant au niveau du groupe, afin d’améliorer la qualité de vie des animaux et de prendre des mesures pour éviter qu’ils ne tombent malades. Quelque 80 troupeaux de bovins sont concernés, comprenant entre 30 et 120 vaches laitières.
Mon prédécesseur faisait déjà de la médecine vétérinaire préventive autour de la reproduction, mais nous avons élargi le programme à mon arrivée, dès les années 2000, pour avoir une approche globale, de l’alimentation à la qualité du lait, des jeunes animaux au déparasitage, etc.
Concrètement en quoi consistent vos interventions ?
Nous travaillons avec un logiciel nord américain. Chaque vache a son dossier où tout est inscrit : maladies, résultats de laboratoire, analyses régulières de son lait. La qualité du lait est contrôlée, en surveillant notamment le taux de globules blanc : ces indications d’éventuelles infections ou inflammations vont nous permettre de donner des conseils relatifs à l’alimentation, à l’hygiène des animaux et des bâtiments.
L’ensemble des données recueillies permettent de mieux planifier le quotidien de l’éleveur, par exemple en ce qui concerne les vêlages et la production de lait, tout en respectant au mieux la physiologie de l’animal. Après chaque passage du vétérinaire, l’éleveur reçoit ainsi un planning mensuel pour l’alimentation. C’est particulièrement important pour les phases de transition - passage de la lactation au tarissement, retour à la lactation. Par exemple, après le vêlage, l’alimentation de la vache doit être plus riche en nutriments et en énergie, afin de couvrir leurs besoins avec davantage d’herbe ou de foin, pour prévenir les risques l’hypocalcémie. A l’inverse, il faut veiller à prévenir d’éventuels problèmes hépatiques, ou à ce que la vache ne devienne trop grasse notamment en phase de tarissement. Cela permet parfois d’éviter de traiter des animaux malades, voire des abattages…
Peut-on mesurer l’impact de ce programme ?
Il s’agit d’une initiative privée : ce service est facturé selon un forfait par animal ou une tarification horaire. Il répond visiblement à la demande puisqu’il connaît une augmentation régulière, en dépit de la crise qui frappe le secteur laitier et de la disparition de certaines exploitations.
Son impact se situe à plusieurs niveaux : sur le bien-être et la santé de l’animal, tout d’abord, mais aussi sur le sujet très sensible de l’utilisation de médicaments et d’antibiotiques. En réduisant nettement ces derniers, le programme a un effet positif en termes de résidus dans le produit fini mais aussi de résistances aux antibiotiques…
Enfin, l’aspect économique est loin d’être négligeable pour l’éleveur s’agissant d’un secteur, la production laitière, qui souffre de sa faible rentabilité. Les éleveurs ont tout intérêt à prévenir… Une étude estime que pour un franc investi dans la prévention, le retour est de cinq francs. C ‘est aussi un constat qu’on peut appliquer à la médecine humaine…
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