Le fromage reste la star absolue des produits laitiers transformés en Suisse. «Dans un contexte marqué par la pandémie, la branche a tiré son épingle du jeu. Les années 2020 et 2021 ont été exceptionnelles au niveau des exportations de fromage suisse. C'était une vraie surprise, tout comme la consommation indigène qui a été forte notamment à cause du confinement», explique fièrement Jacques Gygax, directeur de l'association faîtière des artisans suisses du fromage Fromarte. Mais la situation a changé en 2022. 

L’année n’est pas encore terminée, toutefois Jacques Gygax donne déjà la tendance: 7,5% de baisse par rapport à 2021, en considérant les chiffres jusqu’à la fin octobre. «La situation n’est pas catastrophique pour autant», rassure-t-il. «Il faut relativiser ces données. On est revenu à des chiffres sensiblement similaires à 2019, à savoir la période avant le Covid-19.» Et si cette baisse se poursuivait l’année prochaine? «Ça commencera à poser problème. On aimerait que la situation se stabilise, mais cela dépendra de Poutine», ironise-t-il.

L’Appenzeller enregistre une baisse de 15%

Outre le contexte inflationniste généralisé, le franc fort met à rude épreuve la branche. «Une hausse du franc suisse peut avoir des répercutions allant jusqu’à 4 euros sur le prix final d’un fromage à l’export. On peut comprendre le consommateur qui s’y détourne au profit d’un produit moins coûteux», déplore Jacques Gygax.

La situation est complexe en Europe, le principal marché d’écoulement du fromage suisse - soit 80% des exportations -  avec l’Allemagne comme premier importateur (42% en 2021; les chiffres pour 2022 sont encore indisponibles), puis l’Italie (14%) et la France (8%). «La guerre en Ukraine a plongé le vieux continent dans de grandes incertitudes. L’Allemagne est particulièrement impactée (ndlr: elle est tributaire de la Russie pour plus de la moitié de ses importations de gaz jusqu’en 2022). Ce n’est donc pas la période la plus propice pour vendre des produits haut de gamme dans un pays où le pouvoir d’achat baisse. La situation économique étant tendue, la population achète au meilleur marché. On le ressent bien avec l’Appenzeller, le principal fromage vendu dans ce pays. On a enregistré une baisse de 15%.»

Et de compléter: «Le comportement des consommateurs est très psychologique . En Italie, l'alimentation a une valeur culturelle importante. L’Emmentaler AOP, par exemple, se porte très bien. On regrette la légère baisse des exportations en France, un pays à forte tradition de consommation de fromage, tout comme au Bénélux. Actuellement en Europe, on observe une contraction des volumes exportés.» Si la Suisse est bien positionnée au niveau européen, elle continue à développer sa présence internationale. La surprise cette année vient du côté du marché américain (12% des exportations en 2021). «Le gruyère AOP, par exemple, s'est magnifiquement bien développé aux Etats-Unis.»

LES ANNÉES 2019 À 2021 EN CHIFFRES

En 2021, 2020 et 2019, la production de fromage s’est élevée respectivement à 207’000 tonnes, 203’791 t, et 194’114 t. La part du fromage exporté a avoisiné les 40%. En 2021, le volume de fromage suisse exporté a augmenté de 6,9% par rapport à 2020. La valeur des exportations a elle aussi progressé de 9,1%. Au total, 82’470 tonnes (+5346 t) de fromage ont été exportés pour 756,7 millions de francs. Une progression qui s’est expliquée, d’une part, par l’augmentation du volume exporté et, d’autre part, par des hausses de prix. En 2020 et 2019, le volume exporté a enregistré une hausse respectivement de 1,6% (par rapport à 2019) et 4,5% (par rapport à 2018). En terme quantitatif, cela représente respectivement 77’124 tonnes et 75’877 tonnes.

Kalina Anguelova/AGIR

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Suite de la série:

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