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Des mauvaises herbes qui font du bon boulot
Sans doute l’avez-vous remarqué, de plus en plus de champs agricoles sont régulièrement envahis par des « mauvaises herbes ». Mais, si un nombre croissant d’agriculteurs laissent ces plantes - souvent joliment fleuries - s’étaler sur leurs terres, ce n’est pas par paresse. C’est par soucis écologique. De plus, contrairement aux apparences, ces végétaux ne sortent pas du sol par hasard, ils sont semés volontairement.
Il faut d’abord savoir que les paysans ont l’obligation légale de ne pas laisser leurs champs nus entre le 15 septembre et le 15 novembre. Si leur parcelle n’est pas occupée, par exemple par du blé ou de tournesol, à cette période, ils peuvent alors semer un mélange destiné au bétail. Ou un couvert végétal, appelé également engrais vert.
Utilisés tout au long de l’année
A Genève, où il n’y a quasi plus de bétail, ces étendues fleuries se sont généralisées ces dernières années. « Aujourd’hui, 2500 hectares sur les 6000 hectares de surface agricole du canton sont régulièrement occupés par un couvert « biomax » qui associe une bonne douzaine de plantes », relève Nicolas Courtois, technicien chez AgriGenève. L’intérêt de semer de tels couverts est multiple, raison pour laquelle de nombreux agriculteurs ne les utilisent pas qu’à l’automne, mais également durant le reste de l’année, entre deux cultures.
Cette pratique, qui s’intègre souvent dans l’agriculture de conservation (semis-directs - rotation importante des cultures – couvert végétal) mais pas uniquement, permet notamment de limiter l’utilisation de produits phytosanitaires, tout en protégeant le sol. Un procédé qui n’a pas attendu le dépôt des deux initiatives sur lesquelles on va prochainement voter, pour s’imposer.
Voici quelques avantages concrets de ces couverts végétaux.
- Effet antipollution
Après une récolte, il reste des éléments nutritifs dans la terre, tel que l’azote et le phosphore. « Le couvert végétal permet de les pomper et de les remonter à la surface. Ainsi, on limite la pollution des rivières et des nappes phréatiques, tout en conservant ces éléments nutritifs pour la récolte qui suit», explique Nicolas Courtois. - Effet anti-érosion
Généralement denses, ces couverts végétaux ralentissent l'écoulement du ruissellement et maintiennent une bonne porosité à la surface du sol. En fin de cycle, l’engrais vert - qui est un mélange d’herbes, de fleurs et de graminées - est écrasé et se décompose sur place. Ce qui nourrit le sol, tout en le préservant, là aussi, de l’érosion. - Moins de phytosanitaires
« On choisit les « mauvaises herbes » que l’on veut planter afin d’occuper la place et éviter que celles qui pousseraient par elles-mêmes, et qui nuiraient à la culture suivante, ne s’installent», relève encore Nicolas Courtois . En plus d’être utilisés entre deux récoltes, certains couverts végétaux sont semés en parallèle d’une culture, notamment le colza. En prime, certaines plantes ont le pouvoir d’attirer les limaces et donc ainsi d’éviter que la culture ne soit dévorée. - Production d’oxygène
Les couverts végétaux absorbent du gaz carbonique dans l’atmosphère puis, via le cycle de la photosynthèse, libèrent de l’oxygène. Ce qui est bénéfique pour l’environnement. De plus, le carbone rend le sol fertile. Donc, plus il y en a, mieux c’est. Une fois écrasé, l’engrais vert contribue également à nourrir la terre, qui a été très appauvrie au fil des ans, suite l’exploitation intensive des champs voulue par la politique agricole à partir de la deuxième partie du 19e siècle. - Bénéfique pour la biodiversité
Ces couverts végétaux favorisent la présence d’abeilles, mais aussi d’une multitudes d’autres insectes et d’une importante biodiversité animale, allant des oiseaux aux chauves-souris, en passant par toute une macrofaune : petits rongeurs, lièvres, renards, chevreuils… - Esthétique dans le paysage
Ces mélanges de plantes et de fleurs diverses et multicolores contribuent à embellir le paysage et profite à tout un chacun.
Pascale Bieri/AGIR