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Des Saint-Bernards, gardiens inattendus des troupeaux d'alpage
De plus en plus d’agriculteurs renoncent à monter leurs troupeaux à l’alpage, durant l’été, en raison de la présence du loup, toujours plus forte. Comme bien d’autres, Samuel Pierroz, éleveur à Liddes (VS), a subi des attaques et perdu des animaux. Il a toutefois décidé de continuer à alper, en prenant toutes les mesures possibles pour protéger ses troupeaux, dont des chiens de protection: des Saint-Bernards…
"J’aime trop l’alpage pour arrêter, confie le jeune éleveur. On a aussi la chance d’avoir d’excellentes conditions, ici à l’alpage d’Era d’en haut, au-dessus de Liddes, notamment un chemin accessible en voiture et des écuries pour rentrer les troupeaux la nuit." Il y a toutefois eu une grosse remise en question, il y a quelques années, quand une meute de loups lui a tué une cinquantaine de moutons... "Là, c’était soit je trouvais un chien de protection soit j’arrêtais."
Cinq ans d'expérience: un bilan positif
Face à la longue attente pour obtenir un chien formé par les programmes soutenus par la Confédération, le jeune éleveur a décidé de prendre les choses en main. "J’ai choisi de prendre un chiot et de le former moi-même."
Son choix se porte alors sur une race qu’on n’a pas l’habitude de voir dans ce rôle: le Saint-Bernard. "C’est un chien que j’ai toujours aimé, et mon père avait déjà fait des essais au début des années 90, lorsque les premiers loups sont revenus en Valais", explique-t-il. "L’expérience avait bien fonctionné, mais avec la disparition temporaire des loups, elle s’était arrêtée."
Aujourd’hui, Samuel Pierroz a 5 ans d’expérience avec ses Saint-Bernards. Et il est "hyper content". "Au début, comme il n’y a pas beaucoup de recul avec cette race, on ne savait pas vraiment comment ils travaillaient. On les a observés de nuit, en présence de loups qui venaient dans les abords des parcs, pour savoir si on avait fait un bon choix. Et on a eu la confirmation que c’était vraiment un super chien."
Une vie en alpage adaptée aux nouvelles menaces
Durant toute la saison estivale, Samuel, sa femme Sarah, et leur petit garçon – bientôt rejoint par un frère ou une sœur – vivent à l’alpage. "Il y a dix ans encore, les bêtes étaient en semi-liberté, dans de grands parcs, et l’on montait les voir deux à trois fois par semaine. Avec la menace du loup, il a fallu s’adapter: présence permanente, clôtures renforcées et chiens de protection."
La famille Pierroz élève des vaches allaitantes, des chèvres et des moutons, principalement des races autochtones. Actuellement, deux Saint-Bernards veillent sur les troupeaux de chèvres et de moutons. Dans l’avenir, l’éleveur espère avoir une portée de chiots afin de non seulement proposer des jeunes chiens à d’autres collègues intéressés, mais aussi pour renforcer la protection de ses propres bêtes, y compris ses vaches. "Pour l’instant, nous n’avons pas eu d’attaques sur les bovins, mais quand on voit ce qui se passe dans le Jura vaudois, on sait qu’on n’est pas à l’abri. Et, ici, à Era d’en haut, la pression du loup est très forte."
Un grand capital de sympathie
Et si le nombre de chiens de protection augmente à l’alpage, Samuel Pierroz est d’autant plus convaincu que le Saint-Bernard est le chien de la situation. "C’est un chien très polyvalent, un excellent gardien, mais aussi un symbole de secourisme, notamment grâce aux chanoines du Grand Saint-Bernard. Il a un grand capital de sympathie, renforcé par des films comme Beethoven. Les gens sont généralement détendus et contents quand ils le voient, ce qui facilite la cohabitation. Évidemment, cela reste un chien qui est là pour protéger les troupeaux, et même s’il est bien socialisé, certaines règles de cohabitation doivent être respectées."
Pascale Bieri/AGIR