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Il transforme l’ail en mets gastro
Ceux qui ne connaissent pas le produit, et qui tomberaient par hasard sur une tête d’ail provenant de chez Christophe Gatabin (31 ans), risquent d’être surpris… L’intérieur est noir. Comme pourri, carbonisé, desséché. A moins qu’on y voit-là, plus joliment, un pruneau d’Agen ou une truffe. En réalité, c’est de l’ail noir. Une délicatesse produite par le jeune agriculteur sur le domaine familial du Verger, à Lussery-Villars (VD). Il est le seul, en Suisse, à proposer une telle spécialité 100% locale. Ce qui lui a vallu de figurer parmi les 4 finalistes pour l’AgroPrix 2020.
Un parfait autodidacte
Au départ, Christophe Gatabin cherchait à se diversifier. A côté des vaches allaitantes, de l’élevage de poulets, des grandes cultures et pommes de terre et des pensions pour chevaux, il souhaitait « proposer quelque chose qui suscite un échange intéressant avec la clientèle. » La culture de l’ail l’intéressait. En plus de l’agriculture, il est passionné de technique et de chimie… La production de l’ail noir, un condiment qui nécessite un long et savant processus de transformation, était donc faite pour lui.
Totalement autodidacte, le jeune agriculteur s’est alors documenté, renseigné… Notamment au Japon où l’ail noir a vu le jour, et au Québec où il s’est lié d’amitié avec de jeunes producteurs comme lui, avec qui il a pu progresser en parallèle. « C’est une vraie passion. Aujourd’hui, j’ai développé ma propre technique, mais l’objectif est de continuer à évoluer pour avoir le meilleur produit à valeur ajoutée possible, tout en restant à un niveau de production artisanal. »
Au bord de la Venoge
Le jeune agriculteur assure toutes les étapes de son ail : de la plantation à la transformation. Il lui a d’abord fallu investir dans une planteuse et une récolteuse d’occasion. Depuis 2017, il plante plusieurs ares de caïeux en octobre, et récolte environ une tonne d’ail au printemps. « C’est une culture qui a besoin d’une terre argileuse. Les parcelles que nous possédons au bord de la Venoge sont parfaites pour cela »
Les têtes blanches sont ensuite transformées en ail noir, selon un lent et minutieux processus. L’étape la plus délicate et la plus complexe réside dans la lente réaction de Maillard qui brunit les sucres et transforme les acides aminés sous l’action des enzymes. Pour obtenir ce résultat, Christophe Gatabin a mis au point et construit sa propre étuve à atmosphère contrôlée. L’ail y passe deux jours à 80°C, puis un mois à 50°C. Une fois torréfié, il restera un autre mois entreposé dans le local fermé et ventilé dans cet objectif.
Comme un bon vin
A l’arrivée : un étonnant et délicat produit, avec une structure très tendre et un goût délicatement sucré, dans lequel se révèlent des arômes qui varient d’un producteur à l’autre. « Comme le vin, l’ail prend ses minéraux et ses acides aminés dans la terre, il révélera toutes ses saveurs avec le temps », explique Christophe Gatabin. Cet été, pour découvrir diverses variantes, il a fait un tour de France des producteurs d’ail noir. Ils sont six ou sept, et selon le jeune agriculteur : « deux d’entre eux valent vraiment le détour. »
Pour sa part, l’ail vaudois du Domaine du verger évoque principalement les fruits rouges, la truffe, le pruneau et le caramel.
C’est un condiment parfait pour assaisonner un plat, une salade, et qui peut même être directement tartiné sur un toast. On lui prête également de nombreuses vertus pour la santé. L’ail noir contient deux fois plus d'antioxydants que l'ail blanc et apporte de nombreux acides aminés, minéraux, oligo-éléments et vitamines absorbés facilement par l'organisme.
La production de Christophe Gatabin est en vente dans certains commerces de détail ou sur le site web du Domaine du verger.
Pascale Bieri/AGIR