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Le savoir suisse enquête sur le monde rural
« Voici L’agriculture
dans son nouveau rôle, notamment celui de sauvegarder l’environnement!».
Bertil Galland, président du Comité d’édition, est heureux de fêter la
cinquantaine d’ouvrages de la collection avec ce titre. Cette synthèse
correspond bien à l’esprit de la série : mettre à la portée du public des
textes à vocation encyclopédique portant sur des aspects historiques,
d’actualité et surtout porteurs d’avenir.
« L’agriculture, sujet d’avenir ? ».
Dominique Barjolle, co-auteur de l’ouvrage répond illico par l’affirmative. « On est prit de court par
l’actualité. A tel point que je viens de remplir trois gros classeurs
d’articles récents sur le sujet ». Et la directrice de la Centrale romande de
l’association pour le développement de l’agriculture et de l’espace rural
(AGRIDEA) de pointer son doigt sur les points chauds qui placent le monde
agricole sous le feu des projecteurs: le réchauffement climatique fait perdre
des terres cultivées, zones désertiques qu’il faudra compenser ; avec la
démographie galopante il y a toujours plus de bouches à nourrir ; la crise
énergétique incite les agriculteurs à produire des agrocarburants plutôt que
des denrées alimentaires.
Comment enrayer la hausse des prix? Comment faire face aux
émeutes des affamés en diverses parties du monde? Comment concilier la production
de nourriture vitale et la production d’énergie verte? Quels sont les impacts
de la politique agricole qui se décide aujourd’hui sur l’avenir de
l’agriculture? L’avant-propos des trois auteurs ouvre la boîte aux questions.
Il s’agira, en une dizaine de chapitres, « d’apporter un éclairage nouveau
sur la politique agricole suisse, son histoire récente et ses enjeux » et
de « montrer la complexité d’une agriculture en interface avec des
composantes économiques, écologiques et sociales ».
Pari gagné. La synthèse est réussie. Etayée par une enquête
auprès de spécialistes de politique agraire (17 entretiens), elle offre, en
complément, une série de tableaux sur les régions, exploitations, productions
et niveaux politiques.
« Ce n’est pas un livre blanc !», a précisé
Jean-Marc Chappuis, responsable d’une division de l’Office fédéral de
l’agriculture (OFAG) et co-auteur du livre. La remarque vaut son pesant
d’allusions, d’abord à l’ouvrage d’Avenir Suisse (« Paysan libéré »
2006), ensuite au fait que l’opuscule apporte des angles d’éclairage
complémentaires : l’un par l’Office fédéral de l’agriculture via son responsable suppléant de la division Marchés
et affaires internationales –J-M. Chappuis – l’autre par l’Union suisse des
paysans par son responsable du département Economie et politique, Christophe
Eggenschwiler ; ces tendances officielles et syndicales temporisées par la
conseillère agricole en chef, Dominique Barjolle.
Encadré
Sur le thème de la
biodiversité
« Dans les conditions climatiques de la Suisse,
l’abandon de l’exploitation rurale entraînerait un envahissement des surfaces
laissées en friche par la
forêt. Toute faune et toute végétation sont tributaires de la
poursuite d’une utilisation agricole des terres, comme de nombreux
micro-organismes vivant dans les sols et essentiels à leur fertilité ». Au
chapitre de la préservation de la biodiversité et du paysage, l’ouvrage sur
l’agriculture présente des liens directs avec celui de Blaise Muhlhauser
« La faune disparaît » (« Le savoir suisse » n°54 des
éditions PPUR). Dans un chapitre consacré à la perdrix grise, le biologiste
neuchâtelois constate que « la mise en place de jachères florales
pluriannuelles a eu un effet immédiat sur l’avifaune : moins de cinq ans
après la mise en place de ces surfaces, à titre de compensation écologique,
plusieurs espèces menacées de Suisse les ont investies ; fauvette
grisette, tarier pâtre, hypolaïs polyglotte, bruant proyer, de même que la
caille des blés et l’alouette des champs ». Le conservateur des vertébrés
au Muséum d’histoire naturelle de Neuchâtel met quelques bémols à son
enthousiasme. Une étude ornithologique basée sur l’étude de 127 régions
agricoles de Suisse montre que seulement le sixième des surfaces conviennent à
la nidification des oiseaux. Le biologiste reste néanmoins optimiste en jugeant
que la nouvelle orientation de l’agriculture « marque une nouvelle
ère » et que la mise en réseau des biotopes permettra de « retrouver
des paysages diversifiés, disparus à cause de la croissance économique des
cinquante dernières années ».