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« On espère une meilleure compréhension réciproque »
- Comment se porte l’agriculture suisse aujourd’hui ?
- Tout d’abord, on peut dire que l’agriculture, dans le contexte de pandémie actuel, assure pleinement son rôle principal, celui d’approvisionner la population en denrées alimentaires. Ensuite le thème central actuel est certainement les effets de la production agricole sur notre environnement. A ce sujet, l’agriculture a déjà beaucoup évolué ces dernières années. Elle n’a pas attendu le dépôt des initiatives extrêmes voulant réduire l’utilisation de produits phytosanitaires, pour sortir de la tendance productiviste. Il y a 20 ans que l’on diminue, petit à petit, les intrants. Et les statistiques montrent que, depuis 2010, l ‘utilisation des produits phytosanitaires a par exemple été réduit de 30%. On va continuer. Mais la grande problématique de l’agriculture suisse, c’est qu’elle doit faire face à des défis importants, avec des attentes sociétales souvent contradictoires.
- Quelle en est la cause ?
- Une part importante de la population est aujourd’hui urbaine. Elle n’a plus de lien direct avec l’agriculture. Il y a donc une déconnexion entre la majorité des citoyens consommateurs et les activités de production agricoles. Chacun devient un spécialiste agricole, avec ses conseils et ses recommandations, mais également avec une vision doublement faussée de la réalité. Avec, d’une part, la publicité qui transmet une image un peu idyllique de l’agriculture et, de l’autre, la vieille représentation que les gens se font d’une agriculture hyper intensive. Concrètement, la population aimerait qu’on produise bon marché, de bonne qualité, sans risque sanitaire, tout en respectant le bien-être animal et l’environnement. Ce qui ne peut pas se réaliser sans la mise en place de compromis…
- Quelle serait la solution ?
- Ce que nous n’acceptons pas, c’est que les victimes de ces conflits d’objectifs soient les agriculteurs. Il faut que la population se prononce en définissant une priorisation. Est-ce, par exemple, le bien-être animal ou la diminution de la production de gaz à effet de serre?
- Votre objectif pour 2021 est avant tout de convaincre les Suisses à rejeter les deux initiatives phytosanitaires sur lesquels on votera en juin…
- Par rapport à l’agenda politique, c’est effectivement notre priorité. Et on espère que la population suisse dira deux fois non. Toutefois si les initiants ont récolté 100'000 signatures pour chacune de ces initiatives, c’est qu’il y a une réelle préoccupation sociétale et il faut y répondre. Il faut aller vers une agriculture moins dépendante des intrants. On peut réduire les phytos, mais il faudrait diminuer aussi les carburants. Et aller dans la direction d’une agriculture mieux adaptée à son environnement. On doit également développer encore les efforts au niveau de la recherche variétale, trouver des variétés moins sensibles, aux maladies, aux problèmes climatiques, à la sécheresse, etc. Au final, si le but de l’année n’était que d’obtenir deux fois non, au mois de juin, ce serait un peu triste. On espère également que les moyens et l’énergie que l’on va investir dans cette campagne permettront de gagner une meilleure compréhension réciproque entre les familles agricoles et les consommateurs.
Propos recueillis par Pascale Bieri/AGIR
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