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L’agriculture fribourgeoise dit « NON à l’initiative extrême sur la biodiversité »
L’initiative biodiversité va trop loin, elle est extrême, elle rate sa cible en voulant mettre sous cloche de vastes surfaces de la Suisse pour en faire des paysages et des surfaces protégés pratiquement intouchables. Selon Frédéric Ménétrey, directeur d’AGRI Fribourg, la Chambre fribourgeoise d’agriculture, une acceptation de cette initiative entraînerait des répercussions considérables sur les domaines les plus divers, comme l’agriculture et la sécurité de l’approvisionnement, la production de l’énergie, l’exploitation du bois suisse, ou encore l’amélioration des infrastructures. Avec l’acceptation de l’initiative, la dépendance du pays vis-à-vis de l’étranger augmenterait. Le canton de Fribourg agricole, énergétique et touristique serait pénalisé. Dire NON ! à l’initiative extrême, ce n’est pas dire non à la biodiversité, mais c’est dire NON à une initiative coûteuse qui engendrerait des frais de mise en application et des contraintes énormes pour l’économie privée et les collectivités publiques, la Confédération, les cantons et les communes.
Pour Daniel Spahr, agriculteur et producteur de céréales à Saint-Aubin, la production indigène agricole est menacée par l’initiative. A l’heure actuelle, 19 % des surfaces agricoles sont consacrées à la promotion de la biodiversité sur les terres agricoles en Suisse, soit 195 000 hectares de terres ou l’équivalent des cantons de Berne, Fribourg et Soleure réunis. Or, l’octroi de paiements directs exige un minimum de 7 % de surfaces dédiées à la biodiversité. Les familles paysannes en font donc beaucoup plus que demandé, qui plus est sur une base volontaire. Elles sont aussi prêtes à optimiser la qualité des surfaces existantes. Si davantage de terres cultivables fertiles étaient réservées à la biodiversité, la production alimentaire indigène diminuerait encore, ce qui nuirait aussi à l’environnement. En effet, même si la Suisse n’importe que la moitié environ de ce qu’elle consomme, 70 % de son impact environnemental est généré à l’étranger. En cas d’acceptation de l’initiative, il faudrait donc dépendre de surfaces supplémentaires à l’étranger pour assurer l’approvisionnement alimentaire de plus de 500'000 habitants de notre pays. L’initiative est donc en contradiction avec le débat actuel sur la sécurité de l’approvisionnement et la sécurité alimentaire. Tout ce qui n’est pas produit ici, est importé et enlevé à d’autre pays qui n’ont pas les moyens de concurrencer le pouvoir d’achat suisse.
En partie pays d’herbages et de production laitière, le canton de Fribourg verrait sa production phare de fromages connus et reconnus tels que le Vacherin Fribourgeois AOP ou le Gruyère AOP mise sous pression et diminuer. Cette menace de mettre sous pression un mode de production traditionnel séculaire est exprimée par Yves Nicolet, président de la Fédération des sociétés fribourgeoises de laiterie (FSFL). Il a relevé en particulier les conséquences pour les surfaces fourragères: les surfaces de promotion de la biodiversité entrent en concurrence avec les surfaces fourragères. Et de ce fait, on met en péril la production laitière sur de nombreuses exploitations. Pour le Gruyère AOP, au moins 70 % de la ration doit être produite sur l’exploitation. Cette initiative contraindrait beaucoup de producteurs à réduire leur cheptel alors qu’ils ont investi dans une ferme respectant le bien-être animal et que la Confédération a soutenu ces constructions. Finalement, on ne pourrait même plus les utiliser à leur pleine capacité. La construction de nouvelles infrastructures se verrait fortement compromise. Là aussi, ce qui ne serait plus produit en Suisse serait importé et serait produit sous des législations inférieures aux exigences helvètes comme souhaité par le peuple et la Confédération.
Les projets de mise en réseau ont comme objectif le maintien et la promotion de la diversité naturelle des espèces sur la surface agricole utile. Dans ce but, des surfaces de promotion de la biodiversité (SPB) sont créées et entretenues de manière à offrir des conditions favorables pour le développement et la dispersion des animaux et plantes. De tels projets sont élaborés par plusieurs exploitants et des experts. Serge Fischer, président du Réseau écologique Glâne-Nord, présente l’engagement des agriculteurs qui va très au-delà de ce qui est exigé par la Confédération. C’est une preuve de l’investissement, pour ne pas dire engouement de l’agriculture pour la biodiversité. Les agriculteurs de la région n’ont pas attendu 2024 pour prendre conscience de l’importance de la biodiversité. En 2013, quelques agriculteurs glânois se sont rassemblés afin de convaincre leurs collègues d’engager un biologiste et ont fondé le réseau écologique Glâne-Nord 2014. Aujourd’hui, les surfaces de promotion de la biodiversité, mises en réseau, sont composées en particulier de 194 ha de prairies extensives dont 60 ha sont reconnues de qualité 2, c’est-à-dire d’excellente qualité. Les agriculteurs de la région ont fait des efforts pour la biodiversité, en font aujourd’hui et en feront encore demain. Un nouveau réseau, Siviriez et environs, s’est d’ailleurs mis en place en début d’année au sud de notre réseau. Pour lui, cette initiative biodiversité est extrême et inutile, le travail est déjà réalisé par l’agriculture.
Pour les exploitations orientées en production biologique, paradoxalement, l’initiative n’aura pas un effet positif si elle est acceptée. Karin Liaudat, vice-présidente de l'Association fribourgeoise des paysannes qui exploite avec sa famille une exploitations bio, les exploitations agricoles bio s’engagent déjà énormément et avec une grande conviction pour la biodiversité. Les contraintes et techniques de production sont de fait des moyens de favoriser la biodiversité. Comme dans la production animale, avec la production laitière et de poules pondeuses ou dans l’exploitation des herbages et des alpages, un soin particulier à l’environnement est apporté. Il faut pouvoir évoluer et développer afin d’être en accord avec les orientations et choix de production faits mais aussi avec ceux du marché. Il n’est pas possible de bloquer le développement des campagnes en protégeant de manière excessive les paysages et en limitant la production bio de nos fermes. L’initiative veut de fait figer les exploitations et faire baisser la production indigène, ce qui favorisera l’importation de produits étrangers bio.
D’après Michael Moser, membre du Comité des maraîchers de Berne et de Fribourg, la qualité de la biodiversité vaut mieux que la quantité, comme le démontre l’expérience sur le terrain. En effet, selon de nombreuses études, un focus doit être mis sur la qualité de la biodiversité bien plus que sur la surface proprement dite de qualité de la biodiversité. On considère en permanence qu'une plus grande surface protégée doit conduire à une plus grande biodiversité. Les expériences pratiques et diverses études scientifiques montrent cependant que ce n'est pas la quantité d'hectares qui est déterminante pour la biodiversité, mais la qualité des surfaces utilisées. Il existe aussi des types de sols qui ne conviennent pas du tout, par exemple. L'article 104 a de la Constitution fédérale charge les paysans suisses de produire des denrées alimentaires. Celle-ci est réalisée avec énormément de passion et une utilisation précautionneuse des ressources, aussi efficace que possible aujourd'hui. Si nous limitons encore plus les quelques surfaces productives restantes - comme par exemple dans le Seeland ou Grand Marais, le jardin potager de la Suisse, où près de ¼ des légumes suisses sont produits - nous empêchons la production durable. "Cela ne doit pas se produire, c'est pourquoi nous disons non à l'initiative sur la biodiversité".
Les Jeunes agriculteurs ne veulent pas opposer renforcement de la biodiversité et la production de denrées alimentaires. Réduire la production de denrées alimentaires, supprimer des emplois, augmenter les émissions de gaz à effets de serre liés aux importations et mettre sous pression la biodiversité de nos voisins seraient les conséquences de l’acceptation de cette initiative selon Robin Philipona, président des Jeunes agriculteurs fribourgeois. Les agriculteurs se sont engagés, s’engagent et s’engageront à maintenir et renforcer la biodiversité ! Les jeunes agriculteurs fribourgeois comprennent l’importance de maintenir et de renforcer la biodiversité et sont attentifs à cette problématique. La nature est leur outil de travail et ils souhaitent la préserver avec pragmatisme. La formation des jeunes s’améliore et le sujet de la durabilité est un point central. L’arrivée des nouvelles technologies permettent aux agriculteurs de travailler avec moins d’impact sur l’environnement. Cependant, ces machines représentent des investissements difficiles à financer avec les revenus actuels. Les agriculteurs sont des professionnels et ont les compétences requises pour atteindre un équilibre entre le renforcement de la biodiversité et la production de denrées alimentaires. Ils demandent aux consommateurs de leur faire confiance et de voter non à l’initiative sur la biodiversité.
Pour Didier Castella, Conseiller d’Etat, l’acceptation de cette initiative pourrait compromettre la sécurité alimentaire de la Suisse en réduisant la production locale durable. Nous serons exposés à des risques liés aux fluctuations des marchés internationaux et aux crises alimentaires mondiales. La Suisse doit encore investir dans des infrastructures énergétiques pour énergies renouvelables pour notre autonomie énergétique. Une vision globale et une pesée des intérêts seront nécessaires pour équilibrer les besoins énergétiques avec les impératifs environnementaux. Réduire notre production locale de bois va affaiblir notre capacité à répondre à nos besoins énergétiques durables. La capacité de production agroalimentaire fribourgeoise est essentielle pour maintenir une offre de produits locaux et de qualité, c’est un pilier de notre économie fribourgeoise. Encourager la production locale réduit notre dépendance aux importations, l’empreinte carbone est ainsi plus faible que les produits importés. Il est impératif de rejeter cette initiative pour éviter une dépendance accrue vis-à-vis de l’étranger. Importer au lieu de produire n’est pas une solution viable pour la Suisse, elle est contre-productive pour la biodiversité à l’échelle planétaire.
Organisation:
AGRI Fribourg Freiburg (Union des Paysans Fribourgeois)
Intervenants à la conférence de presse :
• Monsieur Daniel Spahr, membre du comité directeur AGRI Fribourg.
• Monsieur Yves Nicolet, président Fédération des sociétés fribourgeoises de laiterie (FSFL).
• Monsieur Serge Fischer, président du réseau écologique Glâne-Nord, producteur de lait.
• Madame Karin Liaudat, membre du comité cantonal AGRI Fribourg.
• Monsieur Michael Moser, membre du comité cantonal AGRI Fribourg, Gemüseproduzenten-Vereinigung der Kantone Bern und Freiburg (GVBF)
• Monsieur Robin Philipona, président des jeunes agriculteurs fribourgeois.
• Monsieur Frédéric Ménétrey, directeur de la Chambre fribourgeoise d’agriculture.
• Monsieur Didier Castella, Conseiller d’Etat.
Images:
Image 1: de gauche à droite : Frédéric Ménétrey, Robin Philipona, Didier Castella, Serge Fischer, Karin Liaudat, Michael Moser, Nicolas Spahr, Yves Nicolet
Image 2: Un investissement concret de l’agriculture pour la biodiversité, cette jachère à Romont
Communiqué de presse d'AGRI Fribourg Freiburg et du Comité fribourgeois « NON ! à l’initiative extrême biodiversité »
Informations:
Murielle Chassot, vice-présidente AGRI Fribourg Freiburg, 079 583 96 31
Frédéric Ménétrey, directeur AGRI Fribourg Freiburg, 079 293 68 70
AGRI Fribourg Freiburg est l'association faîtière fribourgeoise de défense professionnelle. Outre la défense des intérêts généraux de l'agriculture fribourgeoise, AGRI Fribourg Freiburg propose des prestations de services et du conseil aux exploitants agricoles. Elle tient également le secrétariat d'organisations professionnelles. Son siège est à la Route de Chantemerle 41 à 1763 Granges-Paccot. Depuis le 31 octobre 2023, l’Union des Paysans Fribourgeois s’est dotée d’une nouvelle identité: AGRI Fribourg Freiburg.