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Le REDD invite l’agronome Marcel Mazoyer à Lausanne
href="file:///C:DOCUME~1wlaagi00LOCALS~1Tempmsohtml1�1clip_filelist.xmlQuand les récoltes sont bonnes, les prix s’effondrent ; quand elles
sont mauvaises, ils flambent et… « on brade en période d’abondance
une nourriture qu’il faut acheter jusqu’à s’endetter en période de
crise ». Les pics acérés et les creux sans fond des lignes des graphiques
présentés par le professeur Mazoyer ont laissé aux participants à la conférence
comme un relent d’inéluctable, une sorte de fatalité induite par les
conjonctures de la météo et les structures du marché.
Evolution explosive
Au cours du 20e siècle, la population mondiale a augmenté
d’un facteur 2,4 et la production agricole de 2,6. « Malgré les théories
malthusiennes, cette production est insuffisante et inégale », a commenté
le spécialiste en y ajoutant des chiffres dramatiques. Deux milliards de
personnes souffrent de malnutrition, 872 millions de faim et 9 millions meurent
affamées chaque année (dont 6 millions d’enfants). La grande majorité de ces
pauvres, sous-alimentés, sont des paysans. La population mondiale des
agriculteurs est estimée à 2,7 milliards (soit environ 40% de la population
totale) dont 28 millions possèdent des tracteurs, 250 millions utilisent la
force animale et près d’un milliard se contente d’outils manuels. Le professeur
précise encore que 200 à 300 millions de paysans ne travaillent qu’une fraction
d’hectare…
A la révolution agricole (pays développés, zone tempérée, domaines
familiaux) et à la révolution verte (pays tropicaux, exploitations paysannes)
s’ajoute désormais la délocalisation des révolutions agronomiques. Des
consortiums industriels japonais, coréens ou autres se procurent les meilleures
terres de l’Ukraine et de l’Amérique latine (Amazonie en particulier), ou
encore de l’Afrique, pour y pratiquer une agriculture de grands domaines à bas
salaire. A 15 euros/ha de terre et avec une unité de travail pour plusieurs
centaines d’hectares, il est possible de produire une tonne de blé à très bas
prix.
Vu du terrain
Comme la soirée était informelle, le thème très large, l’auditoire
captivé et l’orateur plutôt volubile, ce dernier est sorti un peu des chiffres
et des graphiques pour parler de son
expérience en tant qu’expert
national, puis international, en matière d’économie rurale.
Anecdote sur le terrain : observant des paysans travaillant les
champs avec la traction animale, l’agronome français leur
demande pourquoi ils cultivent des légumes. Les récoltes de coton sont-
elles mauvaises ? « Au contraire, elles sont excellentes. C’est les
prix qui ne vont pas ! », lui a-t-on répondu. Encore un sale coup des
acheteurs de coton, a pensé le professeur Mazoyer. En réalité, c’est
l’abondance de coton de bonne qualité qui a fait chuter les prix. En fin de
récolte, la coopérative qui avait avancé l’argent pour les semences et les
engrais, a transmis aux producteurs, en lieu et place de la prime attendue, une
facture pour le solde à payer une fois déduite la vente du coton…
Régulations indispensables
Combien de fois, l’expert français s’est trouvé écœuré par l’attitude
des grands pays, en particulier des USA. « Ils protègent leur marché
intérieur et leurs exportations en offrant des aides aux revenus et ensuite ils
se battent pour le libre-échange ». L’agronome a précisé que ces
« aides compensatoires » ne sont pas considérées comme pouvant créer
de la distorsion de marché ou du dumping donc peuvent passer la rampe de
l’Uruguay Round de l’OMC sans difficulté.
Exemples à l’appui, Marcel Mazoyer ne voit pas bien comment, face à ce
mercantilisme, le marché agricole pourrait s’en sortir sans des régulations
étatiques.