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Le rendez-vous est triple à Chavannes-le-Veyron
Ciel tout bleu, mer de vert et pouvoir des fleurs: le Yellow Submarine des Beatles n’est pas loin, et vous pourrez donc imaginer Christophe Longchamp, 50 ans tout rond, comme votre "Captain" du jour. Autour de sa ferme familiale, à Chavannes-le-Veyron, il marche dans les pas de ses parents et grands-parents, exploite 33 hectares, élève 150 bœufs et taureaux par année, qu’il nourrit de ses propres maïs, luzerne et lupin. A cela s’ajoutent des semences de céréales sur une dizaine d’hectares, 2,5 hectares de betterave sucrière et un peu de miel. Un chiffre d’affaires total de 650'000 francs annuels. Il s’implique aussi de plus en plus dans la défense professionnelle, "un bon 30%", et vient d’être élu à la présidence d’Agora.
"Pas au milieu de Lausanne avec le métro qui attend"
Ce qu’il espère, en ce dimanche 2 juin "où il fera tellement beau que nos invités se mettront à l’ombre, sous les arbres, pour déguster nos hot-dogs de la région", où la famille et les amis recevront l’appui de commerçants locaux et des paysannes vaudoises du groupe de Cuarnens, c’est qu’un maximum de monde vienne déambuler ici, profiter de la vue sur le Mont-Blanc d’un côté et sur le Jura de l’autre, "que l’on puisse discuter des réalités paysannes sur le terrain, pas au milieu de Lausanne avec le métro qui attend".
A pied, à vélo ou à trottinette
En premier lieu, il y a là un circuit paysan. Il fait 6km, en partie en pleine campagne et en partie en forêt, à l’écart de la circulation automobile. On peut l’emprunter facilement avec ses enfants, à pied, à vélo ou à trottinette. Sur chacun des 25 panneaux informatifs, fournis par l’organe de communication Agriculture Durable, il y a aussi un QR code qui renvoie vers un petit quiz pour les enfants. "Au départ on a mis ça en place en 2020", explique Christophe Longchamp, "sur l’impulsion d’un groupe d’agriculteurs de Denens (VD), dans le contexte des initiatives populaires sur la limitation des produits phytosanitaires. On a voulu montrer et expliquer comment l’on travaille, entre le conventionnel, l’extenso ou le bio". En 2021, trois autres de ces circuits ont suivi. Et pour 2024, le cap est mis sur la valorisation des réseaux de biodiversité. "Il y aura deux visites guidées l’après-midi, qui permettront à un agriculteur ou à un conseiller agricole de préciser les choses. On est 7 exploitants agricoles à Chavannes-le-Veyron, et j’espère que 4 ou 5 viendront, ne serait-ce que pour discuter eux aussi avec les visiteurs."
"50% des traitements éligibles en Bourgeon Bio"
"On ne sera pas d’accord sur tout", concède volontiers l’exploitant, "mais on va pouvoir montrer tout ce qu’on entreprend. Mon père, qui a 78 ans aujourd’hui, peut témoigner des techniques qui ont beaucoup changé, dans ce village qui a toujours eu des productions très diversifiées. L’abandon progressif de la charrue est un bon exemple. Il y a 40 ans, pourquoi aurait-on cessé de labourer, alors que tout allait bien comme ça? C’était le plus simple. Mais la technique a aidé, avec de nouveaux outils, de nouvelles formes de dents, de disques, et les agriculteurs sont surtout mieux formés à la nécessité de maintenir de la vie dans les sols. Autre aspect, le 2 juin, on pourra aussi expliquer que le passage dans un champs d’une pompe à traiter ne signifie pas nécessairement pollution. Aujourd’hui 50% des produits de traitement sont éligibles en Bourgeon Bio, et on a des collègues qui travaillent même avec des purins d’orties, si bien qu’on pourrait boire dans la pompe à traiter! Bien sûr il y a aussi encore des herbicides, des produits pour lesquels il faut faire attention. Mais arrêtons de faire ce raccourci: pompe à traiter égale glyphosate, égale Etats-Unis, égale Monsanto, égale pollution etc."
Tant de choses à expliquer
En termes de qualité écologique, de nombreux agriculteurs sont aujourd’hui fiers des services rendus à la collectivité. Et la Confédération les encourage financièrement via les paiements directs. Ainsi une haie, bénéficiant du bonus qualité et située dans un réseau, rapporte à l’agriculteur une subvention élevée, ce qui, par effet de conséquence, remet d’autant en péril la production de nourriture. "De part et d’autre, les mentalités sont en train d’évoluer", poursuit Christophe Longchamp. "Ici on a 7% de zone réservée à la biodiversité. On s’est mis à 8 communes pour s’adjoindre les services d’un biologiste, qui valide ou pas nos efforts: l’utilité des haies ou des jachères, des arbres hautes tiges tapissés de fleurs, des prés où les vaches vont pâturer. Chaque réseau peut mettre en avant des espèces à protéger, et là encore ce sont les biologistes qui les déterminent. Ce peut être des plantes, comme la gentiane pneumonanthe, la légousie miroir de Venus, l’anémone pulsatille. Ou des papillons, comme la mélitée du Mélampyre, et des oiseaux, la fauvette grisette, le rougequeue à front blanc. L’agriculture, ce n’est plus Heidi qui roule sa boille à lait en bas du talus, ce sont aussi, désormais, des fermes de 100 vaches. Et ces vaches sont peut-être mieux que quand il n’y en a que dix dans une écurie mal éclairée. Posez-nous des questions, et vous verrez qu’on a beaucoup de choses à vous expliquer."
Réduction des gaz à effet de serre
On le prend au mot, la nôtre sera certainement au menu du 2 juin: 150 bœufs et taureaux élevés ici chaque année, est-ce bien durable Captain Longchamp? "Je dirai simplement que, dans le canton de Vaud, il nous manque des bêtes pour avoir une fertilisation naturelle par de l’engrais de ferme, fumier et lisier, alors même qu’on a une importante production de grandes cultures. Notre équilibre national pourrait, lui, être amélioré, car en Suisse alémanique, il se peut qu’il y ait, par endroits, trop de bêtes. Enfin, moi qui ai fait mon bilan carbone sur l’exploitation via AgroImpact, j’arrive à la conclusion que ma production de viande dégage très peu de gaz à effet de serre, un tiers de la moyenne internationale. Et je vais intégrer cette année encore un produit qui, ajouté à la nourriture, limite les rots des bêtes. On peut d’ailleurs remercier le canton qui couvre une bonne moitié du coût de ces produits, lesquels réduisent de 30% les émissions de gaz à effet de serre de nos bêtes."
Etienne Arrivé/AGIR
L’adresse de toutes les fermes participantes (il n’est pas nécessaire de s’inscrire) et des informations complémentaires sont disponibles sur www.fermes-ouvertes.ch.